L’Hôpital militaire de La Tronche

L’Hôpital militaire de La Tronche

Si l’histoire des hôpitaux Grenoble a donné lieu à quelques publications ( De la charité aux soins : l’histoire de l’hôpital à Grenoble, Musée grenoblois des sciences médicales, Grenoble, 1996 ; Histoire des hôpitaux de Grenoble, L’Hospitalier, no 61, avril 1997, CHU de Grenoble ), ces dernières se concentrent avant tout sur l’aventure hospitalière des édifices civiles. Or, en tant qu’importante ville de caserne, Grenoble à durant plusieurs siècles accueilli des centres de soins militaires.

Parmi eux, « L’hôpital Militaire » de La Tronche figure comme le plus grand et le plus moderne de ces bâtiments. Bien que son site soit en reconversion, son emprunte paysagère a marqué durant plus d’un siècle l’actuelle avenue des Maquis du Grésivaudan. Pour comprendre la genèse de cet hôpital construit au XIXe siècle, il nous faut remonter plusieurs siècles en arrière.

Dans le Grenoble du Moyen-Âge, les soins étaient décentralisés et rendus dans différents hospices ouverts aux pauvres et aux indigents. Cependant, à partir du XVIe siècle, ces différentes structures pâtissent de plusieurs crises (inondations, épidémies, guerres de religion). Alors qu’une partie se voit désertée aux vues de leur état déliquescent, les autres peinent à accueillir les malades dans de bonnes conditions.

Lorsque la paix revient au début du XVIIe siècle, le maréchal Créqui, petit-fils de Lesdiguières, décide alors la construction d’un Hôpital Général hors de la nouvelle muraille qui encercle la ville. Rapidement, une extension des remparts est décidée et l’hôpital se retrouve coincé dans un bastion, sans place pour se développer, à l’ombre des murs défendant le cœur de la cité. Ce premier hôpital central accueille civil et militaire au sein d’espaces dédiés mais rassemblés dans une enceinte commune gérée par une institution indépendante.

Au fil des décennies la ville se développe mais l’hôpital ne suit pas, si bien qu’au milieu du XIXe siècle, après plus de 200 ans d’existence, les lieux sont quasiment les mêmes qu’à leur l’origine. N’ayant pas connu de réfection majeure depuis sa construction, l’hôpital est devenu un véritable refuge de misère. Aux vues du nombre croissant de patients lié au développement démographique, les administrateurs ont tenté d’aménager les combles. Mais ces nouvelles chambres ne se pas chauffées en hiver et le maque d’ouverture empêche l’aération des pièces en été. On y meurt de froid ou de chaud lorsque ce n’est pas d’une maladie transmise au sein même de l’hôpital, soit à cause de la promiscuité avec les autres soit à cause du canal central charriant les immondices et déjections de la population du centre-ville. Des voix se lèvent pour dénoncer l’état du complexe. La seule réponse apportée sera pourtant une simple réfection de la façade…

Dans les années 1870 les rapports d’experts se multiplient sur les conditions indignes dans lesquelles sont logés les malades. De plus, la destruction des remparts nourrit chez les maires de Grenoble une volonté de ville moderne, avec ses grandes artères et ses bâtiments inspirés des édifices haussmanniens de la capitale. L’hôpital, verrue à la mauvaise presse au centre de la planification du nouveau quartier bourgeois motive les élus à soutenir le déplacement du centre de santé sur des terres identifiées à La Tronche par l’administration médicale dans les années 1882-1883.

Cependant tout ne se déroule pas comme prévu. En 1894 l’Armée fait savoir qu’elle refuse ce déplacement. Des manœuvres politiques ont lieu jusqu’en 1902, date où l’Armée accepte finalement le transfert à la Tronche. En 1905, les militaires font pression auprès du ministre de l’Intérieur et reçoivent enfin la gestion de leur propre hôpital, jusque là aux mains de l’administration civile.

La construction des nouveaux bâtiments de l’hôpital militaire ont lieu entre 1906 et 1911 et sont inaugurés en même temps que l’hôpital civil en 1913. L’institut se spécialise dans l’accueil de patients atteint de la tuberculose, notamment lors de la 1ère guerre mondiale. Sous l’occupation allemande, l’hôpital tombe aux mains des nazis tout en tentant d’aider la Résistance par l’envoi de matériel médical et de vivres. À la libération, de nombreux maquisards blessés lors des exactions allemandes d’août 1944 seront soignés dans ses murs. De 1945 à 1960, l’hôpital connaît des années fastes: le personnel est très qualifié, l’accueil chaleureux… Mais avec la démobilisation des garnisons de Grenoble, l’hôpital commence à coûter trop cher et il est envisagé de le fermer. Il est sauvé quelques années par les JO d’hiver en 1968, étant donné que l’organisation de l’événement demande lit et praticiens pour les athlètes.

En 1982, il est renommé « Hôpital Émile Pardé », en référence à un médecin maquisard s’étant distingué durant la guerre. Il ferme deux ans plus tard. En 1988, le CRSSA s’installe dans les locaux après deux ans de travaux et de gros investissements pour permettre la recherche sur les risques NRBC (Nucléaires, Radiologiques, Biologiques, Chimiques). Cet institut se développe dans un contexte post-guerre froide avec la crainte de l’utilisation d’armes non conventionnelles dans les conflits mondiaux (bombes chimiques et atomiques) ou d’attaques terroristes (gaz sarin dans le métro de Tokyo en 1994, lettre à l’anthrax en 2001). Durant ses années de service, le Centre de Recherche du Service de Santé des Armées se concentre sur diverses missions, les travaux les plus importants étant : la mise à jour des vaccins contre la variole, la guérison des brûlures chimiques, la compréhension des réponses du corps face au froid ou encore le test de combinaisons de protection NRBC en environnement chaud. Le CRSSA ferme en 2013, suite à un regroupement des instituts de médecine de l’armée dans un seul centre à Brétigny-sur-Orge en banlieue parisienne.

Vous pouvez retrouver et consulter le rapport de recherche complet ICI.