Pendant presque deux ans j’ai refait le chemin de la fonte et de l’acier des vallées ardennaises. Pour découvrir que les nombreuses friches industrielles — plus nombreuses que les quelques usines survivantes — sont rayées de la carte à coup de bulldozers. On rhabille les paysages, on reverdit le décor, on nivelle et on repeint, pour oublier. Les villages sont peuplés de vieillards déçus de la vie, et de jeunes désœuvrés. Bon.
Au musée de la métallurgie de Bogny-sur-Meuse, on expose de rares machines qui ont échappé au ferraillage. Elles sont rouillées avec discrétion et modestes dans leur tenue. C’est étonnant comme les ingénieurs du XIX è siècle pensaient la machine comme un prolongement de l’humain. Il en reste quelque chose de pathétique. Un anthropomorphisme latent. Bon.
J’ai parlé avec elles pendant longtemps. Elles sont belles et tellement seules.